« Pourquoi le Taïcoun est-il parti ? Ses soldats sont-ils tous morts pour… rien ? »

Le corps du capitaine du Shinsengumi marqua un petit tressaillement à cette remarque.

« Lorsque j’ai pris les armes en compagnie de monsieur Kondo, répondit-il, nous étions deux fous qui rêvions de devenir des samouraïs. Nous passions le plus clair de notre temps au dojo. Nous ne vivions que pour les arts martiaux. Lorsque nous ne nous entraînions pas, nous lisions des contes chevaleresques. Quand les étrangers et les renégats se liguèrent contre le Seigneur Tokugawa, nous avons cru trouver l'occasion de montrer à notre pays que la chevalerie d’antan existait encore… »

Il inspira profondément, comme pour comprimer, au fond de sa gorge, un cri de colère. Une larme coula le long d'une de ses joues. Le timbre de sa voix, lui, demeurait inchangé.

« Au diable les intrigues politiques et les manigances du Mikado, du Taïcoun ou de qui sais-je encore. Nous nous battrons jusqu’au bout, avec des sabres ou avec des fusils. Personne ne fera plier le Shinsengumi. Nous avons pour nous mieux que le pouvoir éphémère de ceux qui dirigent notre pays. »

Il tourna vers Ichimura un visage sévère.

« Nous avons la voie immuable des samouraïs, tracée par nos ancêtres guerriers, et nous continuerons d'en creuser le sillon quoi qu’il en coûte. »

Ichimura acquiesça.

« Maître, au risque de me répéter…

— Tu ne m’abandonneras pas, Ichimura. Je le sais. Et je veux que tu te souviennes d’une chose si jamais ton esprit venait encore à fléchir face à nos ennemis.

— Laquelle ?

— Dans ce monde, il y a ceux qui naissent grands. Et puis il y a ceux qui conquièrent la grandeur. »